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Essais

L'Angoisse du roi Salomon, par Jacques Etienne

En 1979, les productions Ary-Gajar nous proposent l'ultime fiction d'Emile : L'Angoisse du Roi Salomon

Humour juif et amour noir, amour juif et humour noir. Telles sont les bases du stock de la maison Rubinstein . Pour bien les goûter, la préparation est délicate : bardez-vous d'un cynisme total mitigé d'un coeur de midinette. Vous y êtes ? Alors, en route ! Jean, un jeune autodidacte qui biberonne au dictionnaire, taxi et bricoleur de ses états, nous conte l'histoire de Salomon Rubinstein, quatre-vingt-quatre ans, enfant prodige raté reconverti dans le prêt-à-porter et amoureux d'une jeune écervelée de soixante-cinq ans, Cora Lamenaire ci-devant chanteuse réaliste, de son plus-en-état. Ils ont tous deux connu les aléas de la guerre : lui, caché dans une cave pour persécution, elle au bras d'un voyou gestapiste par amour. Avant, ils étaient ensemble. Elle l'a « oublié » pendant quatre ans. Lui non plus. D'où rancune. Et ça fait trente cinq ans que ça dure ! Une sacrée histoire d'orgueil . Pour sortir de là, il faudra l'habileté démoniaque d'Ary-Gajar. Salomon va se servir du gars Jeannot comme d'un appât-révélateur qu'il tend à la Cora. En quoi ça consiste au juste ? Comptez pas sur moi pour vous l'expliquer. Allez-y voir vous-même. Parce que le dénouement de l'intrigue n'est pas ce qui importe. La midinette en vous sera comblée, ça je peux vous le dire. Ce qui compte, c'est que l'auteur fait montre tout au long de l'ouvrage d'un parfait équilibrisme. Le sujet, c'est la vieillesse. La décrépitude. La mort. Qui rendent tout le reste vain. Qui créent l'angoisse (ou pétoche). Inévitables. Irrémédiables. Et face à ça… Un Don Quichotte octogénaire en costume prince-de-Galles qui ne veut rien savoir, rien comprendre, rien abandonner. Un réac de la vie qui s'accroche à son privilège avec toute l'énergie de l'espoir. Le jeune Jean en est parfois malade ! Il y a de quoi. Mais que ça lui plaise ou non, c'est l'espérance qui l'emportera. Deux ans avant de nous tirer sa révérence, Roman Kacew nous avait fait ce cadeau. A mon sens le plus beau de tous : un cocktail détonnant où se mêlent subtilement la profondeur de la réflexion, l'inventivité langagière d'un Ajar à son meilleur et tout l'humour du monde… Un livre triste à pleurer de rire. Un vrai livre de vie.

Les Clowns lyriques, par Katch

« Je demeure entièrement fidèle aux aspirations que je moque et agresse dans mes livres afin de mieux en éprouver la constance et la solidité. Depuis que j'écris, l'ironie et l'humour ont toujours été pour moi une mise à l'essai de l'authenticité des valeurs, une épreuve par le feu à laquelle un croyant soumet sa foi essentielle, afin qu'elle en sorte plus souriante, plus sûre d'elle même, plus souveraine. » Dans la préface de ce petit bijou de livre, Gary met son lecteur en garde: il s'attaque avec ardeur, dans toute son oeuvre, aux idéaux en tous genres, mais c'est parce qu'il ne parvient pas à s'en débarrasser, parce qu'il est un rêveur incapable de se situer dans ce monde imprégné partout par l' « inhumanité de l'humain ». L'écriture était son exutoire, sa bouée, l'ami qui lui a si longtemps ôté le pistolet qu'il voulait se mettre dans la bouche depuis qu'il avait atteint l' « âge d'homme ». Lucide, Gary, en dépit de ses multiples facettes, l'était beaucoup trop. Il avait choisi l'humour comme moyen le plus sûr de se distancer de la mascarade qui se répète chaque jour sur notre planète. Mais c'est une manière de rire de tout qui était trop « frontale », trop cynique pour être appréciée à sa juste valeur par les lecteurs. Ses livres les plus bouleversants de vérité sarcastique ont été un échec, de « Tulipe » à « Adieu Gary Cooper » en passant par « La danse de Gengis Cohn ». Gary se sent incompris. Il met alors au point le plus grand canular de l'histoire littéraire, il continue à se rire de tout, mais il invente une écriture nouvelle en se jouant de tout le monde. Il reprend une prose beaucoup plus proche de celle du « Grand vestiaire », il enfante une langue où tout est jeu, jonglant avec des expressions consacrées qu'il déconstruit, portant ses yeux de grand enfant sur les atrocités qui nous entourent. Il devient Ajar. Il se lâche complètement, profite pleinement de ce qu'il appelait sa bâtardise pour inventer des expressions de génie. De « Gros Câlin » à « L'angoisse du roi Salomon », tout le monde crie au génie. De son côté, Gary se marre, il rit, jaune, il les a tous eu et il va donc bientôt pouvoir s'en aller. Mais, avant de partir, il nous laissera encore « Les cerfs-volants » et … « Les clowns lyriques », qui prennent alors une saveur encore plus particulière. Retournons à la préface. Gary parle de son personnage comme d'un type qui « se jette à corps perdu dans la bouffonnerie, la parodie et la dérision pour tenter d'échapper à son aiguillon ». Comme lui. Comme il le fait dans son oeuvre littéraire depuis plus de trente ans, essayant toujours de trouver le ton de voix qui convient pour raconter une histoire, la vérité (c'est quoi ça ?!?) important peu.
« Notre Père qui êtes au ciel, pria-t-il. Permettez-nous de nous élever ! Permettez nous d'accéder à la surface, rendez-nous superficiels ! […] Avant de créer de nouveaux Staline et toute la ribambelle de géniaux pères des peuples, écoutez longuement le coeur des hommes et des femmes qui font l'amour : retenez-vous. Laissez-les continuer. Ne les dérangez sous aucun prétexte. Gardez le génie pour Vous : Vous en avez singulièrement besoin, c'est un homme qui vous le dit. […] » Chapitre 12, Gary reprend une prière, un cri du coeur poussé près de trente ans plus tôt. Malgré tout ce qu'il a vécu, il nous enseigne la chose la plus précieuse qu'il soit, il nous invite à continuer à nous émerveiller et à refuser de devenir aigris par cette vie qui ne nous épargne parfois pas. Avant son ultime offrande à l'histoire, il nous remet entre les mains son chant de « jeunesse » dédié à l'amour.

« Je vais rompre enfin avec celui qui a toujours su que toute oeuvre humaine ne peut être que de l'à- peu-près et qui n'a pourtant jamais pu se contenter de l'à-peu-près. Celui qui a lutté contre les démons de l'absolu et qui n'a pourtant jamais su faire lui-même cette paix avec l'impossible. Qui a toujours su que rien n'est plus ennemi de l'humain que l'extrémisme de l'âme et qui est pourtant lui-même un extrémiste de l'âme ». On ne saurait mieux dire ...


ARRÊTONS LE MASSACRE !... Paroles (d¹après R. Gary) et Musique : E.Ploquin

Pourquoi les hommes ne s¹aident-ils pas vraiment?
Se cherchent-ils bataille à tout bout d¹champ ?
Faut-il toujours qu¹il y ait des méchants ?
Enfin Š Pourquoi tuer les éléphants ?
Pourquoi y a-t-il des querelles entre clans,
Entre nations et entre continents ?
Pourquoi des guerres éclatent à tout moment
De plu(s) ... Pourquoi tuer des éléphants ?

Un pachyderme est naturellement
Paisible et sage, il va tranquillement
Sa puissance et sa masse nous étonnent
Mais sa douceur force nos sentiments

Laissons nous bercer du barissement
Des mastodontes d¹il y a bien longtemps
Faisons leur porter nos rêves d¹enfants
Défense, de chasser les éléphants.

Pour oublier nos petit¹s histoires
Pour nous sortir de nos embarras
Ayons un éléphant dans la mémoire
Lui, c¹est sûr, jamais ne nous oubliera

Il suffit d¹un peu d¹imagination
Dans la savane il n¹ya pas que les lions
Sans nous tromper levons nos horizons
Défense (de) rebrousser destination

Chorus

Face à la pollution sur la terre
Face aux réchauffement des climats
Lançons un appel au grand mamifère
Qui du bout de son nez nous guidera

Pourquoi faut-il faire payer ce géant
Pour les maux d¹la terre et de ses habitants
Au cim¹tière ne le poussons pas vivant
Stoppons le massacre des éléphants
Arrêtons le Mass...
Arrêtons le mass...
Arrêtons le massacre !
Ensemble, Défendons les éléphants !

parlé : ³On est tous des éléphants d¹Afrique²